
Lu An Gua Pian, un classique chinois
En Chine, le Lu An Gua Pian n’a plus besoin d’introduction : il figure dans toutes les listes des meilleurs ou des plus grands thés du pays. Unique en son genre, il s’est taillé au fil du temps une place de choix dans le grand répertoire des thés. Produit d’un terroir maintenant célèbre, on en distingue sur le marché de nombreux crus présentant des grades de qualités différentes.
Le lieu d’origine du Lu An Gua Pian se trouve au cœur de la province d’Anhui. Pour s’y rendre, il faut quitter la ville de Lu’An et suivre la route qui s’enfonce dans les montagnes de Da Bie, serpentant dans l’ombre des forêts de bambous entre les petits villages et les lacs sauvages. Le thé se cultive dans les montagnes autour de la ville, dans des jardins parfois ancestraux où les méthodes de culture traditionnelles se transmettent de génération en génération.
Le nom Lu An Gua Pian (litt. « Graine de melon de Lu An ») lui-même a une histoire disputée. On entendra souvent dire qu’il fut attribué au thé en raison de la forme de ses feuilles qui, une fois arrivées au terme de leur transformation, ressemblent à des graines de melons, ou encore que c’est l’odeur qu’elles émettent durant la transformation qui ressemblerait à celle des graines de melon grillées. Encore plus rares, certains affirment que le nom original du thé, datant de bien avant sa mise aux registres, aurait été Gua Zi Pian (litt. « Graine de tournesol ») qui se serait abrégé au fil du temps en Gua Pian.
Comme ailleurs en Chine, c’est au printemps qu’on s’affaire dans les jardins de Lu’An. Mais plutôt que d’opter pour une cueillette précoce des bourgeons au tournant de la fête des Morts (Qing Ming — début du mois d’avril) on attendra plutôt la fin du mois avant de débuter la récolte pour laisser le temps aux feuilles naissantes de gagner en maturité. Cette différence est cruciale, car alors qu’ailleurs en Chine les jardins de thé mettent de l’avant la fraîcheur des premières pousses, à Lu’An, on laisse volontairement sur l’arbre cette délicatesse pour ne récolter que l’intensité aromatique des feuilles matures. En effet, la cueillette se fera à partir des premières feuilles ouvertes jusqu’aux cinq à huit feuilles pleines en descendant la branche sans jamais prélever de bourgeons.
Une fois détachées de l’arbre, les feuilles sont étendues sur des treillis de bambous pour flétrir, puis équeutées et trIées à la main avant d’être acheminée à l’intérieur pour la dessiccation. La dessiccation des feuilles ici se fait en deux étapes : on les chauffe d’abord dans une première cuve à température élevée, puis dans une seconde à température plus basse pour les aplatir et leur donner forme. Ne reste plus ensuite qu’à les sécher. Une des plus importantes spécificités du Lu An Gua Pian traditionnel est son séchage sur feu de bois. Cette étape particulièrement délicate est celle qui distingue les grands crus des crus ordinaires, car il faut éviter malgré la chaleur des flammes de griller ou de brûler les feuilles fraîchement transformées. Pour ce faire, on empile les feuilles dans de grands paniers de bambous qu’on passera au-dessus des flammes. Le passage au feu est très rapide, au plus quelques secondes au bout desquelles on retirera les feuilles pour les mélanger et les laisser refroidir en agitant le panier avant de recommencer le processus. Rien n’est à omettre, depuis l’essence du bois utilisée pour le feu jusqu’à l’âge du bambou tressant le panier, il faut tout prendre en compte pour arriver au meilleur résultat. En tout, le séchage prend une heure et provoque malheureusement beaucoup de perte. Le procédé est si exigeant qu’aujourd’hui, de nombreux producteurs de thé à Anhui lui préfèrent des méthodes plus modernes et mécanisées. Dans la plupart des jardins, des séchoirs électriques remplacent maintenant les feux de bois. L’attrait des méthodes mécaniques est grand, car elles permettent non seulement de réduire les coûts de production, mais elles stabilisent également sa qualité. Néanmoins il se trouve encore quelques passionnés possédant l’adresse et l’expertise requise pour s’adonner à ce type de transformation ancestrale.
Le Lu An Gua Pian produit selon les méthodes traditionnelles diffère grandement des thés de bourgeons en termes de profil aromatique. Son goût est plus dense, plus riche et moins aérien. On y trouve des parfums rustiques et jardiniers de légumes frais très sucrés ainsi qu’une onctuosité mêlée d’amertume légère. Sa complexité caractéristique des grands crus présente un large éventail d’arômes allant des notes végétales aux notes fruitées en passant par une finale délicatement florale.
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